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Les Libraires - "Toutes des reines"

Photo du rédacteur: ArianeAriane

"Autrice-compositrice-interprète et diplômée de l’École nationale de la chanson, Ariane Beaudry signe chez Hurlantes éditrices un premier recueil de poésie dégageant des effluves aussi doux qu'un bon vin nature et aussi denses qu'une Barbie neuve tout juste déballée. Comme un vin qui se bonifie avec le temps, on découvre dans La Saison du Lion une femme avançant en âge qui se complexifie, gagnant en puissance et en suavité. Il y a même une playlist pour se mettre dans le mood de cette lecture. On sent la sororité être une facette importante de ce projet. Toutes les femmes sont plus reines que les reines; tous les modèles de poupées, de la Barbie à la Bratz à la Bout'chou, se valent. Il n'y a pas UN modèle à suivre. De Lionne à Lionne, d’Ariane à Ariane en plus, je me sens déjà proche de cette poète alors que ses textes ont suscité chez moi ce sentiment de tonicité et de fougue propres à cette saison solaire, où notre petit feu sacré du dedans étincelle de vérité, tantôt féroce tantôt triste. De la même arène, avec l'accord de l'autrice, offrons-nous cette entrevue au « tu ».


Autrice-compositrice-interprète, tu signes avec La Saison du Lion ton premier recueil de poésie. Comment as-tu vécu cette démarche d’écriture et d’édition? En regard à tes projets musicaux, quelles opportunités semblables ou libertés nouvelles la poésie t’aurait-elle offertes?


Cela faisait presque dix ans que je n’avais pas mené de projet créatif qui m’appartenait juste à moi : mon groupe musical Trōpiques, en hiatus depuis la pandémie, était en duo, j’ai travaillé sur de nombreuses opportunités professionnelles avec mon conjoint, et je suis devenue maman en 2020, ce qui vient évidemment avec très peu d’espace mental, de temps et d’énergie pour juste « créer ». C’est une amie autrice, qui savait à quel point je rêvais de publier un jour, qui m’a convaincue de me remettre à l’écriture. Pendant plusieurs mois, elle était la seule personne qui savait que je travaillais sur un manuscrit : je ne voulais pas que personne ne m’influence ou ne me donne de conseils, je voulais enfin ravoir quelque chose qui était 100% moi, me mettre en danger sans une autre personne pour me servir de filet.


La Saison du Lion est une continuité du blogue B Comme Ariane, que j’ai tenu jusqu’en 2016; plusieurs textes du recueil y ont d’ailleurs été empruntés. C’était très émouvant de me replonger dans cet univers et d’y ajouter de nouveaux poèmes, de revivre ces instants-là qui étaient tellement intenses avec une perspective et un regard nouveau. Je me trouvais trèèès dramatique des fois et je me retrouvais parfois dans une position de jugement par rapport à « l’ancienne » Ariane, mais au bout du compte ça aura été extrêmement cathartique et libérateur comme démarche. J’ai adoré travailler avec mon éditrice, Pénélope Jolicoeur, qui a totalement compris ma vibe et n’a jamais tenté de l’altérer. J’ai souvent été confrontée, tant en musique qu’en écriture, à d’autres artistes qui me trouvaient trop « pop », trop bonbon, mais Pénélope a vraiment su voir au-delà de la première impression et a saisi – et bonifié! – ce que je souhaitais exprimer comme message, sans se fier aux apparences ou aux premières impressions. Ceci dit, j’ai quand même tenu à inviter des femmes vraiment cool à mon party créatif : Lauren Radulescu pour la couverture, Jessica Pronovost pour les photos et Ashley Achille pour la préface.


Née sous le signe du Lion, tu auras 36 ans cet été. Quelles sont actuellement les choses qui vivent rent free dans ta tête? Lesquelles t’habiteront longtemps sinon toujours? Dans ton recueil, tu dédies d’ailleurs un poème à ce genre de choses, à travers lesquelles notamment plusieurs personnes se reconnaîtront.


Comme je le mentionnais plus haut, La Saison du Lion est mon premier projet solo depuis longtemps, alors je suis vraiment dans un espace mental où je veux, en vraie Lionne, avoir du succès, que ce soit une réussite – et ça me fait justement me questionner sur ma définition personnelle du succès. Le livre existe, mais le monde continue de tourner, mes journées n’ont pas vraiment changé… alors je fais quoi, là?! Qu’est-ce que je contrôle dans cette aventure-là? Je suis dans une éternelle quête de lâcher-prise – ce n’est pas facile pour moi de me donner un break et de considérer que j’en ai fait assez.


Ces jours-ci, je pense également beaucoup aux femmes qu’on sous-estime dans la culture populaire, particulièrement à Paris Hilton qui s’est récemment adressée au Congrès américain pour faire passer un acte contre l’abus des enfants à la suite de son expérience horrible dans des « écoles » de traitement pour adolescents à problèmes. Même chose pour Kim Kardashian qui étudie en droit et est très impliquée dans la réforme carcérale aux États-Unis. Ça me fait tripper de voir que ces femmes qu’on a considérées comme étant stupides, superficielles et ridicules sont en fait des êtres humains brillants qui utilisent leur plateforme pour faire changer les choses.


Sinon, dans la catégorie « obsessions du moment », il y a la série de télé-réalité Summer House, les petits fruits qui poussent dans ma cour de banlieue, mon défi annuel de lire 50 livres (26 lus, deux en cours), et les mèches ensoleillées dans les longs cheveux de mon fils.


Tu écris pour les femmes et celles dans ta vie t’inspirent. En 2024, une femme, qu’est-ce que ça mange en hiver? Aimer, s’aimer, être mère, être chix, avoir des emotional breakdowns, pratiquer le selfcare, savoir s’entourer de cheerleaders, atteindre ses lifegoals, etc.

Mon intention première avec La Saison du Lion est de démontrer que les femmes sont multidimensionnelles. Depuis ma jeunesse, j’ai de la difficulté à trouver ma place; je me suis souvent sentie trop fofolle pour les « bolés » et trop deep et sérieuse pour les « cools ». Aujourd’hui, je comprends qu’on peut s’intéresser à la politique internationale et être accro aux Real Housewives, on peut lire Michel Tremblay (une influence majeure pour moi!) et de la chick lit, on peut tripper sur le rose et les paillettes et être un individu qui a de la substance.

Les femmes sont vraiment sévères entre elles, ce qui fait qu’elles sont encore plus sévères envers elles-mêmes. On se fait tellement juger de l’extérieur qu’on tente de trouver LA façon d’être une « bonne » femme, une femme valide, et au bout du compte, on se nuit alors qu’on devrait s’unir et démontrer au monde entier qu’il y a mille et une façons d’être une femme, mère ou pas, Botox ou pas, carrière ou pas. Selon moi, être une femme, au bout du compte, ça devrait être tout simplement ce qu’on a envie que ce soit.


Il y a un an, j’ai quitté Montréal avec ma petite famille après quinze ans à y habiter pour retourner dans ma ville natale, et j’y ai rencontré deux femmes exceptionnelles qui sont devenues de très précieuses amies. On se parle plusieurs fois par jour, on élève nos enfants ensemble, on partage tout ce qui nous passe par la tête, on s’encourage dans nos projets… Le concept de sororité est quelque chose qui m’avait vraiment manqué en tant que femme, et je pense que c’est une force dans laquelle on devrait puiser, surtout si on peut aider celles qui sont moins privilégiées que nous.


Tes poèmes sauront parler à beaucoup de femmes. Ton écriture mordante d’un naturel désarmant nous plonge dans des situations universelles, dans ce passage de la vingtaine à la trentaine. Pour parler du vécu, crois-tu que tout puisse se dire en poésie? Y a-t-il des choses qu’on ne dirait pas? Une Lionne ose-t-elle tout dire?


C’est drôle parce que dans les semaines précédant la sortie de La Saison du Lion, je me réveillais parfois en pleine nuit, prise de panique parce que j’avais parlé de telle personne, de telle situation dans le livre, et que je n’avais pas vraiment réalisé que des gens allaient le lire – dans ma tête, je l’écrivais pour moi, d’une façon ultra personnelle, mais je n’avais vraiment pas allumé que ces gens-là allaient y avoir accès, qu’ils pourraient passer à la librairie, l’acheter, le lire et y réagir! Je ne m’attaque à personne, mais c’est certain que je révèle des anecdotes intimes qui n’impliquent pas que moi, et ça me donne parfois le vertige de penser que ma démarche créative personnelle pourrait avoir des effets collatéraux.


Je suis game de révéler pas mal n’importe quoi par rapport à moi-même, je n’ai pas vraiment de tabous… Pour moi, l’écriture est un exutoire qui me permet d’aller au fond des émotions que je vis par rapport à des moments, des situations, que ce soit la tristesse, la honte, la colère ou le doute. La ligne se trace lorsque ça peut affecter négativement quelqu’un qui n’a pas demandé à voir ses bobos bien à vif exposés devant tous. Anyway, mes bobos à moi sont en masse exhibitionnistes!


Maintenant, il nous tarde de te lire encore. Quel est le prochain projet d’écriture d’Ariane Beaudry?


L’écriture de mon prochain livre est bien avancée – on parlait de patience et de lâcher-prise plus haut, mais je me suis garrochée dans l’écriture du deuxième recueil dès que j’étais dans un épisode d’attente par rapport au premier! J’ai appris en juin 2023 que j’étais neurodivergente; ce sera un thème phare du recueil.


C’est un peu épeurant de repartir à zéro et de n’écrire que de nouveaux textes alors que La Saison du Lion est une compilation de plus de dix ans de création, mais tout comme ce premier livre a été pour moi un regard porté sur le passage de la vingtaine à la trentaine, le suivant sera plutôt une observation du moment présent et un regard vers l’avant, alors que j’entame la deuxième partie de ma trentaine… même si je suis encore un peu dans le déni que le grand 4-0 s’approche tranquillement, je dois l’avouer! Je pense que je ne suis pas faite pour être une grande personne – j’essaie vraiment fort!


Photo : © Jessica Pronovost"




Merci à Ariane Lehoux Traversy et Les Libraires!

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